Il y a peu de temps, en faisant la recherche de photos pour un nouveau livre, j’ai réalisé que j’ai débuté sérieusement la photo d’oiseaux en janvier 2000. J’ai pris mes premières photos à l’été 1993 lorsque je me suis installé à la campagne, mais la qualité de ces photos ne répondait pas encore au standard que j’espérais atteindre.
En 1995, lors de mes premiers essais de scénario photo, j’avais creusé une fosse dans la neige et disposé de vieux bâtons de hockey pour supporter une toile blanche qui me servait alors de cache. J’avais planté une branche dans la neige afin d’offrir un perchoir aux oiseaux. Je me souviens avoir attendu un Plectrophane lapon pendant plusieurs jours avant qu’il ne se pose sur ce perchoir.
À l’hiver 2000, j’ai débuté la création de scénarios photo plus élaborés et je me suis rapidement aperçu que les résultats devenaient beaucoup plus intéressants. J’ai alors débuté l’utilisation de pieds de studio afin de pouvoir ajuster le perchoir à la hauteur désirée. De plus, je pouvais ainsi disposer le pied de studio à un endroit précis pour obtenir l’arrière-plan le plus favorable à l’image que je voulais créer. Avec l’emploi du pied de studio, je n’étais plus obligé d’enfoncer un perchoir dans le sol et j’obtenais donc beaucoup plus de latitude de création.
Cardinal à poitrine rose
600mm + 1,4x ; 1/500 sec, f5, ISO 320
Flash et Better Beamer
Trépied Gitzo et tête Wimberley
Photo : Daniel Dupont
Cette photo de Cardinal à poitrine rose femelle demeure pour moi l’une de mes belles réussites. Saisir la fraction de seconde où l’oiseau écrase le fruit a été une grande récompense pour toutes les heures passées à attendre.
Puisque l’attente peut être longue, je privilégie toujours l’emploi d’un trépied. Je pointe toujours mon objectif sur le perchoir et je demeure immobile sans faire de bruit. Il serait dommage de faire fuir l’oiseau en bougeant l’objectif trop rapidement.
Je préfère utiliser une faible profondeur de champ pour obtenir un arrière-plan le plus discret possible. Il est donc très important de faire une mise au point précise sur l’oeil du sujet.
Trouver le bon scénario selon l’espèce :
J’ai souvent observé des photographes tenter de créer des scénarios de prise de vue, mais sans avoir une connaissance suffisante du sujet qu’ils désirent photographier. Pour ma part, lorsque je conçois un scénario, je le destine à une espèce en particulier et cela me permet de créer une image plus réaliste. Si je suis en forêt boréale, j’utiliserai une branche morte avec de la mousse comme perchoir. Si je suis dans un marais, je privilégierai alors une quenouille ou une plante aquatique.
Créer un scénario en fonction de l’espèce désirée :
Chaque printemps, depuis mon arrivée à la campagne en 1993, j’observe dans mon jardin quelques couples de Cardinaux à poitrine rose. Lorsque je les observais aux mangeoires, je constatais qu’ils avaient souvent le bec teinté de rouge, surtout lors de la période de fructification du sureau rouge. Puisque j’avais des arbustes de sureau dans le jardin, j’ai installé une cache près de l’un d’eux et j’y ai passé de nombreuses heures à attendre le passage d’un Cardinal à poitrine rose.
Malgré les longues heures d’attente, je n’ai pas vu l’ombre d’un oiseau venir s’y alimenter lorsque j’y étais de faction. Malgré tout, en observant l’arbuste, je ne pouvais que constater que les fruits disparaissaient en mon absence de la cache. Il y avait donc deux possibilités : passer plus de temps dans la cache , ou créer un scénario de prise de vue près des mangeoires. La deuxième possibilité était plus intéressante, puisque je pourrais photographier d’autres espèces et j’étais certain que les cardinaux allaient passer régulièrement.
Cardinal à poitrine rose mâle
600mm + 1,4x ; 1/500 sec, f5, ISO 320
Flash et Better Beamer
Trépied Gitzo et tête Wimberley
Photo : Daniel Dupont
Élaborer un scénario :
Lors de mes premiers essais, je coupais une branche de sureau chargée de fruits et je la maintenais sur le pied de studio à l’aide d’une pince de traction. Malheureusement, dû à la chaleur, les feuilles flétrissaient rapidement et le résultat n’était pas à la hauteur de mes attentes. Je me suis donc confectionné un support incliné à environ 45 degrés sur lequel j’ai fixé une bouteille de plastique remplie d’eau avec des attaches plastiques (Ty-Rap). J’ai percé un trou dans le bouchon correspondant au diamètre de la branche que je désirais utiliser comme perchoir. Ce support est alors placé sur le pied de studio pour obtenir toute la mobilité désirée.
Le choix du perchoir :
Lors des ateliers photo, j’explique toujours comment je choisis le perchoir. Il est évidemment important que celui-ci soit esthétique et dans le cas de ce scénario, qu’il soit chargé de fruits. Il est aussi essentiel que l’oiseau puisse s’y poser. La branche peut être surchargée de fruits mais si l’oiseau ne peut se poser, le scénario sera inefficace.
Je choisis aussi toujours le diamètre du perchoir en fonction du poids de l’oiseau que je désire photographier. Pour un Geai bleu, le diamètre de la branche sera supérieur au cas d’un Sizerin flammé.
Attirer votre sujet dans le scénario :
Pour attirer les oiseaux dans mes scénarios, je dispose quelques mangeoires à proximité. Évidemment, l’efficacité se limite aux espèces frugivores et granivores. Je place généralement de petites mangeoires afin de créer une certaine compétition plutôt qu’une énorme mangeoire. Les oiseaux sont donc beaucoup plus mobiles et cela augmente la possibilité que l’un d’entre eux se pose sur le scénario.
La discrétion avant tout :
Pour plus de discrétion, j’utilise pratiquement toujours une cache de camouflage. Les oiseaux n’éprouvent donc aucune crainte à s’approcher. Puisque je crée la majorité de mes scénarios dans mon jardin, j’utilise une immense cache en bois que j’ai construite il y a plusieurs années.
Le respect de la nature :
Comme je possède un grand terrain que j’ai aménagé pour les oiseaux, j’attends toujours pour élaguer mes arbres et arbustes que la saison de création de scenarios soit révolue. Évidemment, tous n’ont pas cette possibilité. Je vous suggère donc de faire l’achat de plants en pot et d’y couper des perchoirs selon vos besoins. Vous pouvez aussi contacter une compagnie d’entretien paysager pour récupérer les branches qu’ils auront coupées. À l’hiver 2004, lors d’une sortie au Jardin botanique de Montréal, j’avais récupéré des branches de pommetiers que des employés venaient de couper à la suite de verglas.
Réussir des scénarios en plein hiver est beaucoup plus simple car les oiseaux se retrouvent concentrés aux mangeoires. Au printemps et au début de l’été, cela requiert beaucoup de patience, surtout à la période de fructification, alors que les fruits abondent dans la nature.
Bonne photo !
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